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CUBA

Île de l'Atlantique, la plus vaste des Grandes Antilles, au S. de la Floride ; capitale La Havane. Peuplée avant l'arrivée des Européens par les Indiens Taïnos du groupe des Arawaks, Cuba fut découverte par Christophe Colomb dès son premier voyage, le 27 oct. 1492. Sa colonisation ne commença qu'à partir de 1511, avec Diego Velázquez. C'est de cette île que Cortez entreprit la conquête du Mexique (1519) et Hernando de Soto l'exploration de la Floride. Anéantie par le travail forcé et les épidémies, la population taïno fut remplacée à partir de 1526 par une main-d'oeuvre noire fournie par la traite. L'économie agricole se développa, avec le tabac, les plantes tinctoriales puis la canne à sucre ; le café ne fut cultivé qu'au XIXe s. Le principal rôle de Cuba, dans l'Empire espagnol, était de servir d'étape et de lieu de rassemblement aux navires de commerce qui venaient des divers pays du continent et s'acheminaient en convoi vers l'Espagne. Cuba obtint la liberté commerciale en 1818 mais resta une colonie espagnole, alors que le reste de l'Amérique latine accédait à l'indépendance. Plusieurs rébellions marquèrent le XIXe s., surtout après que l'île, en 1837, eut été privée de sa représentation aux Cortés. Les impôts excessifs, la dureté du régime militaire, l'exclusion des Cubains des fonctions gouvernementales provoquèrent en 1868 un soulèvement populaire et la proclamation d'une république insurrectionnelle. La guérilla se poursuivit pendant dix ans, mais l'Espagne parvint à rétablir son autorité en accordant à l'île un régime d'autonomie (1897). Cependant, les États-Unis étaient résolus à faire entrer Cuba dans leur zone d'influence : au terme de la guerre hispano-américaine de 1898, l'Espagne dut abandonner définitivement Cuba, qui devint un État indépendant en 1901. Les Américains s'assurèrent un protectorat sur l'île par l'amendement Platt (1901), qui leur conférait un droit d'occupation militaire en cas de troubles - droit dont ils usèrent en 1906/09 et en 1912. L'économie cubaine devint entièrement dépendante des États-Unis. La vie politique fut marquée par des dictatures comme celles de Gerardo Machado (1925/33) et de Fulgencio Batista (1933/59). Ce dernier s'empara personnellement du pouvoir en 1952. La corruption et l'arbitraire se développant, Batista fut rapidement contraint de recourir à l'état de siège. La rébellion armée contre son régime commença le 26 juill. 1953, lorsque Fidel Castro et ses premiers compagnons tentèrent de s'emparer de la caserne de Moncada, à Santiago. Arrêté, mais amnistié et libéré l'année suivante, Castro se réfugia au Mexique. En déc. 1956, il débarqua clandestinement dans la province de l'Oriente, et organisa des maquis qui s'étendirent peu à peu dans l'île entière. Le 1er janv. 1959, Batista dut s'enfuir de La Havane, laissant la place à un régime révolutionnaire dont Fidel Castro, bien qu'il n'ait pas pris la présidence de la République, fut, dès le début, l'inspirateur incontesté. Après une élimination radicale des partisans de Batista et des autres opposants, Castro regroupa les divers mouvements qui avaient participé à la lutte contre Batista dans un parti unique, d'abord le parti uni de la révolution socialiste (PURS) puis le parti communiste de Cuba (PCC). Le pays, essentiellement agricole, souffrait depuis longtemps des inconvénients de la monoculture de la canne à sucre ; près de 55 % des plantations appartenaient à des propriétaires ne résidant pas sur leurs terres et 40 % environ étaient aux mains des Nord-Américains et 90 % des exportations cubaines et étaient destinées aux États-Unis, qui exerçaient ainsi leur tutelle sur le pays. Les relations entre La Havane et Washington se détériorèrent rapidement après la réforme agraire de juin 1959, qui interdisait les propriétés de plus de 40,5 ha, la nationalisation des raffineries de sucre (août 1959) et celle des raffineries de pétrole (oct. 1959). À la fin de 1960, la valeur des biens nord-américains confisqués par le nouveau régime cubain s'élevait à environ un milliard de dollars. Les États-Unis rompirent les relations diplomatiques avec Cuba et donnèrent asile et assistance aux réfugiés cubains anticastristes (plus de 200 000 dès 1961). Soumise au blocus économique des États-Unis (1961), menacée par les tentatives des émigrés soutenus par Washington (échec du débarquement dans la baie des Cochons, 16 avr. 1961) (v.), exclue de l'Organisation des États américains (conférence de Punta del Este, janv. 1962), Cuba chercha appui auprès de l'Union soviétique, qui devint le principal acheteur de sucre cubain. Mais, devant la vive réaction du président Kennedy, les Soviétiques durent renoncer à installer des fusées offensives dans l'île (oct. 1962) (v. CUBA, crise de, oct. 1962).

Le régime de Fidel Castro

Sous la direction de Castro, Cuba évolua rapidement vers un régime de dictature socialiste, caractérisé par la toute-puissance d'un chef charismatique, par le règne d'un parti unique, par l'extension de la bureaucratie et le rôle croissant de l'appareil policier. Des progrès remarquables furent réalisés dans les domaines de la santé publique, de la sécurité sociale et de l'éducation nationale. L'économie cubaine, en revanche, n'allait pas cesser de connaître de graves difficultés, dues à la rupture des relations économiques avec les États-Unis, à la fuite de nombreux cadres intellectuels et techniques, et aussi aux ambitions présomptueuses de Fidel Castro. Au lieu de donner la priorité à la diversification de l'agriculture, il imita l'exemple de la révolution soviétique en s'engageant dans une industrialisation que l'île, isolée, n'avait guère les moyens de mener à bien. Reconnaissant ce premier échec, il proclama la primauté de l'agriculture, en particulier de la canne à sucre. Dans sa politique extérieure, Castro rêva longtemps d'être le propagateur de la révolution en Amérique latine, mais, après la mort de Che Guevara (1967), la dépendance économique croissante de Cuba à l'égard de l'URSS l'obligea à se conformer à la ligne soviétique, hostile à une révolution violente et déterminée à un rapprochement avec les États-Unis. En 1968, Castro approuva l'intervention soviétique en Tchécoslovaquie, et, en juill. 1972, Cuba fut admise comme membre à part entière du Comecon (v.). À partir de 1973, Castro améliora ses rapports avec les États latino-américains et avec les États-Unis, qui commencèrent à relâcher leur blocus. Castro ne faisait cependant aucune concession pour se rapprocher d'eux, et, en 1975, il envoyait un corps expéditionnaire cubain en Angola (v.) pour assurer, conjointement avec l'Union soviétique, la victoire du MPLA. L'intérêt de Cuba pour l'Afrique n'a fait que se renforcer comme l'ont confirmé les visites successives de Fidel Castro en Libye, en Éthiopie, en Angola, en Tanzanie et au Mozambique, en 1977. En dépit de ses dénégations, le corps expéditionnaire cubain a servi de relais à l'Union soviétique, notamment en Angola et en Éthiopie. Mais l'entretien de l'importante force militaire cubaine coûtait cher en dépit de l'aide soviétique, d'autant que l'économie cubaine connaissait une crise grave. Cuba, qui tirait 70 % de ses recettes de l'exportation du sucre, fut durement frappé par la chute du cours mondial. Les perturbations météorologiques du début de 1983 ont été catastrophiques. Malgré le rationnement alimentaire, il a fallu réduire encore ou supprimer les prestations sociales et augmenter les prix. Cuba s'est montrée réticente à la perestroïka mise en place en URSS par M. Gorbatchev. Sous la pression soviétique, elle dut mettre un terme, en 1989, à son intervention en Angola. L'île a été économiquement traumatisée par l'éclatement du bloc soviétique avec lequel, en 1989, elle réalisait 84 % de ses échanges et qui lui apportait une aide correspondant à 50 % de son PNB. La pénurie de pétrole et de pièces détachées a entraîné une chute des récoltes de sucre. Les conditions de vie des Cubains se sont détériorées de façon inquiétante, le marché noir fournissant les produits nécessaires à la subsistance. Le gouvernement cubain, sans remettre en cause la direction politique par le parti unique, a entrepris des réformes : légalisation de la détention et de l'utilisation des dollars, exercice privé de certains petits métiers du commerce et de l'artisanat, instauration d'un impôt sur le revenu, création d'entreprises mixtes avec des investisseurs étrangers, notamment dans le tourisme. Cependant l'image internationale de Cuba s'est trouvée ternie par le régime policier renforcé depuis les années 1990. En juin 1989, l'exécution du général Ochoa, héros de la guerre en Angola, et de trois de ses compagnons, sous l'inculpation peu vraisemblable du trafic de drogue, a soulevé une grande émotion. Et la répression contre les opposants, notamment les intellectuels et les journalistes s'est maintenue. Cherchant à faire pression sur Washington, les autorités cubaines ont permis en août 1994, un exode maritime de milliers de Cubains vers les États-Unis, qui conclurent en sept. de la même année un accord avec Cuba par lequel ils s'engageaient à accueillir 20 000 Cubains par an. Amorçant une timide reprise à partir de 1995 notamment grâce au tourisme, l'économie cubaine est restée entravée par l'embargo américain qu'a renforcé la loi Helms-Burton, promulguée en mars 1996 par le président Clinton et frappant de sanctions tout pays commerçant avec Cuba. La visite du pape, en janv. 1998, a manifesté la volonté du pouvoir castriste de dissiper son isolement internationale mais le Commissariat aux droits de l'homme de l'ONU a condamné le régime cubain, en avr. 1999. L'essor du tourisme a eu pour effet d'augmenter la prostitution et la criminalité, celles-ci entraînant à leur tour un renforcement de la répression. Un allégement des sanctions économiques a été voté par le Sénat américain en avr. 2000. En déc. 2001, des navires américains ont, pour la première fois depuis 1962, débarqué des vivres. Mais la répression contre les dissidents s'est durcie et, au début de 2004, la violence des propos de Castro a provoqué la rupture des liens diplomatiques de Cuba avec le Mexique.

CUBA (Crise de, octobre 1962). Grave crise dans les relations américano-soviétiques qui fit craindre le déclenchement d'une troisième guerre mondiale. En octobre 1962, un avion de reconnaissance américain découvrit l'installation dans l'île de Cuba de rampes de lancement de fusées offensives, dirigées contre les États-Unis. Le président Kennedy décida le blocus de Cuba et ordonna des préparatifs pour un débarquement dans l'île, tout en lançant un ultimatum menaçant l'URSS. Khrouchtchev, après deux semaines de graves tensions, accepta de retirer ses fusées, sous le contrôle de l'ONU, contre l'engagement américain de ne pas envahir l'île. Cette crise entraîna d'importantes modifications dans les relations internationales. Le risque de déclenchement d'une guerre nucléaire normalisa les relations entre les deux grands : un « téléphone rouge » fut installé entre Moscou et Washington et des premières négociations sur la limitation des armements furent entreprises. Voir Coexistence pacifique.

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