CROS Charles
CROS Charles 1842-1888
Hortensius Emile Charles, qui naît à Fabrezan dans l'Aude, le 1er octobre, est le quatrième enfant du ménage Cros. Le père est professeur de lettres quoique docteur en droit. En 1849, il est démis de ses fonctions de professeur pour activités républicaines. Il doit donner des leçons particulières dont ses fils profitent: tous trois se montrent exceptionnels dans tous les domaines. Charles passe son bac à 14 ans et, au même âge, possède couramment l'hébreu et le sanskrit. A partir de 1863, Charles Cros entreprend, de loin, des études de médecine. En fait, il a d'autres activités. Il fréquente les cafés du Quartier Latin et les journalistes hostiles à l'Empire. Il invente: un appareil à télégraphe, un «procédé d'enregistrement et de reproduction des couleurs, des formes et du mouvement» (dépôt de la description à l'Académie des sciences, en 1867). Il écrit et publie (en 1869) ses premiers poèmes. En 1868 il a rencontré Nina de Villard une pianiste riche qui tient salon, et sera sa maîtresse jusqu'en 1878. C'est chez elle que Cros fait la connaissance de Verlaine dont il restera un ami fidèle. En fait, de 1870 à sa mort, Charles Cros sera de tous les mouvements poétiques «en marge»: il est encore parnassien quand il héberge Rimbaud dans son atelier, en 1871, puis sera des zutistes, des hydropathes, fréquentera le «Chat noir», le café artistique de la Nouvelle Athènes. Ses amis, outre Verlaine donc, et Rimbaud le peu de temps qu'il est à Paris, auront nom Coppée, Germain Nouveau, Richepin, Villiers de l'Isle-Adam. Le premier recueil de poèmes de Cros, Le Coffret de Santal, paraît en 1873, à compte d'auteur (c'est Nina qui paie, pour se faire pardonner une infidélité qu'elle lui a faite). L'année suivante il lance une revue, qui n'aura que deux numéros et publie un long poème, en édition illustrée par Manet, Le Fleuve. En 1877, il adresse à l'académie toute une série de notes sur deux inventions: une machine à reproduire les sons, le paléophone, et un procédé de photographie en couleurs. Il écrit aussi des monologues comiques destinés au comédien Coquelin Cadet. En 1878, il épouse Mary Hardjemaal qui lui donnera deux fils. Les dernières années du poète sont sombres. Même s'il construit et fait fonctionner ses machines à enregistrer le son et à le reproduire (1881-82), même s'il continue à perfectionner ses procédés de photographie en couleur et poursuit ses recherches scientifiques, appliquant la photographie à l'astronomie, étudiant les fluides électriques, Cros, dont le talent n'est reconnu ni comme savant, ni comme poète, se trouve en butte à de graves difficultés financières; son caractère s'aigrit, d'autant que des excès de boisson (l'absinthe) commencent à ruiner sa santé. De surcroît, en 1885, Mary tombe malade. Cros continue pourtant de collaborer à de petites revues littéraires, mais dont l'écho est confidentiel. En 1888 est publié La Vision du Grand Canal royal des Deux Mers. Il meurt le 9 août 1888, à 46 ans, inconnu et misérable, laissant une grande quantité de poèmes inédits qui seront publiés trente ans après sa mort, par son fils Guy, sous le titre: Le Collier de Griffes. Curieux «phénomène» que ce Charles Cros ! On a peu d'exemple dans la littérature française d'un talent aussi divers, Pascal sans doute, mais personne d'autre après lui. Seulement, au pays de Descartes, dans cette époque si sérieuse où déjà l'on classe et répertorie, nul ne l'a pris au sérieux. Les savants? ils ont dû froncer le nez en le traitant, insulte des insultes, de «poète». Pour les académiciens du temps il est «un jeune fou tout à fait indiscipliné». Ses anciens amis du Parnasse l'ont expulsé du mouvement, Coppée le premier, et Anatole France, qui lui reprochent d'être un malfaisant démolisseur (à vrai dire Verlaine et Mallarmé étaient dans la même charrette de bannis). En plus, il a commis des monologues comiques ! La reconnaissance est venue. On décerne tous les ans les prix et grands prix, du disque de l'académie Charles Cros; on connaît ses inventions; depuis 1923, après que les surréalistes l'ont re-découvert et annexé comme un de leurs prédécesseurs, il est enfin considéré — unanimement ou presque — comme ce qu'il est un grand poète.
Né en 1842 à Fabrezan, dans l'Aude, Charles Cros, sous la tutelle de son père, un instituteur, se révèle vite un génie : il apprend seul le sanscrit et l'hébreu, et obtient son baccalauréat à 14 ans. Capable de passer de la littérature à la physique et à la chimie, il fait des travaux en électricité, en optique, en acoustique... À 18 ans, il est professeur de chimie à l'institut des sourds-muets de Paris (il le reste trois ans, avant de se consacrer à la recherche). À l'Exposition uulverselle de 1867, il présente un télégraphe de son invention... Un an avant Edison, en 1877, il invente le phonographe, mais ne sait en tirer aucun profit. À ses activités de scientifique, il ajoute celle de poète. Ami des parnassiens comme des symbolistes, il fréquente Verlaine et Rimbaud, se brouillant avec le premier à cause de l'inconduite du second, est l'intime du peintre Édouard Manet comme de l'humoriste Alphonse Allais, lance le célèbre cabaret du Chat noir et publie Le Coffret de santal, son principal recueil poétique, avant de mourir, en 1888, à 46 ans (son second recueil, Le Collier de griffes, est posthume). Les contemporains de ce bohème qui vit — et qui boit beaucoup — dans les cafés pour fuir la solitude ne soupçonnent pas, à l'exception de Verlaine, son talent poétique et son génie d'inventeur. Les surréalistes, plus tard, le reconnaîtront comme leur précurseur.
Poète, né dans l’Aude. Autodidacte, il apprend si vite et si avidement qu’il devient dès l’adolescence une sorte d’érudit prodige : professeur de sanskrit et d’hébreu à seize ans ; de chimie, à dix-huit. À l’Exposition de 1867, il propose un télégraphe automatique, et invente en 1877, avant Edison, le phonographe ; mais ne se soucie guère d’exploiter ses découvertes. Il ne rêve que gloire poétique. À l’époque, le « vert laurier » chanté par Ronsard se cueille dans les cafés : celui de La Nouvelle Athènes, où règne le « scandaleux » Catulle Mendès ; ou du côté des Vivants, menés par un autre célèbre hirsute, Jean Richepin. Il leur préfère les vrais aventuriers des lettres, alors inconnus du public : Villiers de L’Isle-Adam, Verlaine, Huysmans et Rimbaud (qui se réfugie chez lui en octobre 1871). Quant à lui, on le tient volontiers pour un aimable fantaisiste, « l’auteur du Hareng saur », et il en souffre. C’est plus d’une génération après sa mort que les surréalistes mettront à sa vrai place ce chercheur infatigable, cet inventeur en tous domaines. En poésie, surtout : Je sais faire des vers perpétuels, dit un de ses sonnets. Son Coffret de santal (1873) ne contient pas qu’un hareng saur, mais aussi vingt curieux sonnets et la série des Chansons perpétuelles. Grâce à Breton, on relit La Vision du grand canal royal des deux mers (posthume, 1888) ainsi que les derniers poèmes, réunis par ses amis dans Le Collier de griffes (1908). Enfin l’ensemble de son œuvre a été édité (et étudié) dans la « Bibliothèque de la Pléiade ».