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Corriger le droit positif

On peut être tenté de considérer que le droit idéal ou naturel l'emporte sur le droit positif, et s'il se présente comme une supra-norme destinée à normer la norme juridique positive : c'est la mission du législateur que de rapprocher le droit positif du droit idéal ou naturel, en légiférant le regard fixé sur l'idée de juste. Dans ce cas, il conviendrait de considérer comme illégitime, bien que légale, une loi positive injuste, cad non conforme à l'idée de juste, et de ne reconnaître de pleine légitimité qu'aux lois positives· effectivement conformes à la supra-norme de justice. La loi positive ne serait pleinement juste, légitime, disons presque juridique, que dans la mesure où elle serait une adaptation de la loi idéale ou naturelle. Elle devrait alors être respectée. En revanche, dans l'hypothèse où la loi positive s'écarterait de la supra-norme, se poserait sérieusement la question de savoir s'il ne vaudrait pas mieux désobéir. On appelle « idéalisme juridique », la doctrine qui subordonne la validité de la loi positive à sa conformité à la loi idéale ou naturelle, la doctrine qui fonde le droit positif dans le droit idéal ou naturel.

Pour les tenants du droit naturel: LE LEGAL N'EST PAS TOUJOURS LEGITIME.

TEXTE DE LEO STRAUSS, PARTISAN DU DROIT NATUREL:

Léo Strauss (US - XX°siècle): « Néanmoins, le besoin du droit naturel est aussi manifeste aujourd’hui qu’il l’a été durant des siècles et même des millénaires. Rejeter le droit naturel revient à dire que tout droit est positif, autrement dit que le droit est déterminé exclusivement par les législateurs et les tribunaux des différents pays. Or il est évident qu’il est parfaitement sensé et parfois même nécessaire de parler de lois ou de décisions injustes. En passant de tels jugements, nous impliquons qu’il y a un étalon du juste et de l’injuste qui est indépendant du droit positif et lui est supérieur : un étalon grâce auquel nous sommes capables de juger le droit positif. Bien des gens aujourd’hui considèrent que l’étalon en question n’est tout au plus que l’idéal adopté par notre société ou notre « civilisation » tel qu’il a pris corps dans ses façons de vivre ou ses institutions. Mais, d’après cette même opinion, toutes les sociétés ont leur idéal, les sociétés cannibales pas moins que les sociétés policées. Si les principes tirent une justification suffisante du fait qu’ils sont reçus dans une société, les principes du cannibale sont aussi défendables et aussi sains que ceux de l’homme policé. De ce point de vue, les premiers ne peuvent être rejetés comme mauvais purement et simplement. Et puisque tout le monde est d’accord pour reconnaître que l’idéal de notre société est changeant, seule une triste et morne habitude nous empêcherait d’accepter en toute tranquillité une évolution vers l’état cannibale. S’il n’y avait pas d’étalon plus élevé que l’idéal de notre société, nous sommes parfaitement incapables de prendre devant lui le recul nécessaire au jugement critique. Mais le simple fait que nous puissions nous demander ce que vaut l’idéal de notre société montre qu’il y a dans l’homme quelque chose qui n’est point totalement asservi à sa société et par conséquent que nous sommes capables, et par là obligés, de rechercher un étalon qui nous permette de juger de l’idéal de notre société comme de toute autre ». « Droit naturel et Histoire »

=> Il y a une catégorie de droits qui sont liés à la personne humaine. En les revendiquant l'individu semble agir en tant qu'individu et se dresser contre les limitations imposées par les règles de l'État. Droit à la vie, au bonheur, à l'assistance, au travail, à la liberté individuelle, à la libre circulation, à la liberté d'opinion et de conscience, etc. C'est au nom de ces "droits" que l'individu revendique contre le droit positif et c'est au nom de ces "droits" que se font les réformes et les révolutions...

La réflexion montre que ces droits ne sont individuels que par illusion, Ils sont valables dans la mesure où ils expriment des aspirations universelles. C'est donc non pas en tant qu'individu isolé que le sujet les formule, mais en tant que personne humaine, en tant que membre du genre humain. Il les revendique au nom de l’humanité. Ils représentent bien aussi des intérêts, mais cette fois des intérêts communs à tous les hommes en tant qu'homme.



CONCLUSION DE LA PREMIERE PARTIE: LE DROIT RATIONNEL

Cependant, la notion de « droit naturel » reste confuse et on peut lui préférer celle de « droit rationnel ». En effet, le « droit naturel » ne peut pas être un droit qui existerait dans la nature. Ce n'est pas la nature, mais la raison humaine qui institue le droit. Aussi, est-ce plutôt d'un « droit rationnel » qu'il conviendrait de se réclamer pour combattre les erreurs du droit positif.





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