Comment Descartes dépasse-t-il dialectiquement la thèse des sceptiques ?
Comment Descartes dépasse-t-il dialectiquement la thèse des
sceptiques ?
Au XVIIe siècle, le mathématicien, physicien et philosophe Descartes cherche à rebâtir la
science, à la reconstruire sur de nouvelles bases. A son époque, le savoir repose sur des
bases incertaines, on ne parle pas vraiment de science mais plutôt de scolastique. Cette
discipline qui cherche à accorder la foi et l’aristotélisme ne convient pas à Descartes : ce
dernier souhaite baser la science sur des faits établis et prouvés. Pour cela, il va adopter la
méthode du doute hyperbolique. Le doute consiste en remettre en question quelque chose,
à décider du vrai du faux. Descartes va douter d’absolument tout, il va considérer faux tout
ce qui est établi. Sa méthode s’inspire du scepticisme, un courant de pensée qui vient de
l’Antiquité et qui estime que la vérité est inaccessible. Il faudrait donc, selon le scepticisme,
avoir une attitude critique envers toutes les vérités générales ou les dogmes. Cependant,
Descartes va se différencier du scepticisme, il va pratiquer le doute cartésien. Contrairement
au doute sceptique, le doute cartésien a une finalité : arriver à une certitude. Le doute
sceptique est plutôt subi, les sceptiques sont conduits par le doute. Ainsi ils doutent pour
douter tandis que Descartes doute pour ne plus douter. Il veut adopter une méthode plus
rigoureuse que le scepticisme afin d’acquérir des connaissances. Il veut trouver la vérité et
ne pas se contenter du vraisemblable. En partant de la même base que les pratiquants du
scepticisme, Descartes parvient à les outrepasser.
En effet,
lorsqu’on analyse le procédé de Descartes, on y reconnaît la présence d’un processus
dialectique. Selon la loi du processus autodynamique, Descartes va commencer par penser
que tout ce dont il peut douter est faux. Cela inclut les vérités d’école, les vérités qu’on
apprend depuis l’enfance, l’aristotélisme et la scolastique. Ces vérités peuvent être
erronées, donc fausses. Il y a aussi les sensations, l’intuition, qui reposent sur les sens. Elles
sont source d’erreur, comme on le voit avec les illusions d’optique. Dès lors, on ne peut se
reposer sur les sens pour rechercher la vérité. De plus, il y a les vérités physiques qui sont
aussi caduques : il est possible d’être dans un rêve ou d’être fou, ce qui voudrait dire qu’on
ne peut se baser sur la réalité qui nous entoure. Et enfin les vérités mathématiques : selon
Descartes il est plus difficile de douter de ces dernières car elles ne tiennent qu’à l’esprit,
cependant elles peuvent nous tromper. La première explication est que Dieu est trompeur,
il cherche à nous mettre dans l’ignorance par bonté. La deuxième est que le Malin Génie, un
être qui dévoue toutes ses forces à nous tromper, nous induit en erreur. Toutes ces vérités
établies sont fausses car on peut en douter, mais douter c’est penser. Si on doute, c’est
qu’on pense, et si on pense c’est qu’on existe. On en arrive à la conclusion qu’on ne peut
douter de son existence. Descartes a donc trouvé une chose qui “résiste” au doute, la
pensée. Parmi toutes ces choses fausses qui nous entourent, la pensée est la seule chose sur
laquelle on peut se reposer. Le cogito est la pierre angulaire de la recherche de la vérité,
même en niant de tout, on ne peut nier de ce fait. Ainsi, en partant du fait que tout est faux,
Descartes a réussi à trouver une chose vraie. Son cheminement correspond bien à un
processus dialectique, car à partir d’un fait : “je peux douter de tout”, il parvient à découvrir
une vérité, c’est un processus immanent, qui vient de l’intérieur. Grâce à sa propre pensée,
il a réussi à trouver la réponse à ses questions. De plus il respecte une autre loi de la
dialectique qui est la contradiction : au départ, on part d'aucune vérité, on doute de tout,
ensuite on parvient à trouver un fait établi.
Malgré les similitudes entre le doute sceptique et le doute cartésien, Descartes se
distingue du scepticisme en ayant pour but de trouver des réponses. En approfondissant ses
pensées, Descartes a réussi à dépasser le scepticisme en établissant une vérité, ce qui met
fin au doute éternel. Le doute chez Descartes n’est que temporaire : il permet d’acquérir de
nouvelles connaissances. La remise en cause continuelle ne peut aboutir à l’établissement
d’une science, car la science est un ensemble de faits vérifiés et prouvés. Comme l’a dit
Descartes : “Toute science est une connaissance certaine et évidente ; et celui qui doute de
beaucoup de choses n’est pas plus savant que celui qui n’y a jamais pensé.”