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COLLABORATION

Nom donné à la politique d'entente et de rapprochement avec l'Allemagne nationale-socialiste qui fut poursuivie de 1940 à 1945 par divers gouvernements et mouvements politiques de l'Europe occupée. • La collaboration en France • Dans les autres pays

La collaboration en France

Formulée officiellement par le maréchal Pétain dans son message du 11 oct. 1940, la collaboration, n'était, pour les dirigeants de l'État français, qu'une manoeuvre politique imposée par les circonstances. À partir de févr. 1941, l'amiral Darlan dut consentir à ce qu'elle fût renforcée ; en avr. 1942, P. Laval qui lui succéda la mit en œuvre. Elle devint une volonté d'engagement total, à la fois politique, idéologique et bientôt militaire, dans l'« Europe nouvelle » dirigée par l'Allemagne hitlérienne. Parmi les chefs de la collaboration parisienne, quatre groupes peuvent être distingués : a) d'anciens partisans des idées de Briand, depuis toujours acquis au rapprochement avec l'Allemagne, comme J. Luchaire, G. Suarez, F. de Brinon, Drieu la Rochelle ; b) des hommes de gauche, attirés par la formule de socialisme autoritaire du national-socialisme, comme M. Déat ; c) des intellectuels d'extrême droite, souvent anciens militants de l'Action française proches du fascisme, comme R. Brasillach, L. Rebatet, P.A. Cousteau ; d) des chefs politiques ambitionnant personnellement le pouvoir, comme J. Doriot, M. Bucard, E. Deloncle. Les principaux journaux politiques de la collaboration furent : Aujourd'hui (G. Suarez), Les Nouveaux Temps (J. Luchaire), Le Cri du peuple (Doriot), L'oeuvre (Déat), les hebdomadaires Je suis partout (Brasillach, Rebatet) et La Gerbe (A. de Châteaubriant). Les journaux de grande information paraissant sous le contrôle de l'occupant, diffusaient les thèmes de la propagande allemande : Paris-Soir, Le Matin, Le Petit Parisien. La collaboration se manifesta également dans plusieurs mouvements : le Rassemblement national populaire (RNP) de Marcel Déat, le parti populaire français (PPF) de Jacques Doriot, le Mouvement social révolutionnaire (MSR) d'Eugène Deloncle... Dès le début de la guerre germano-soviétique fut décidée (juill. 1941) la création d'une Légion des volontaires français contre le bolchevisme (LVF), qui combattit sur le front de l'Est et reçut un message d'encouragement de Pétain. À partir de 1943 se constituèrent également des unités françaises de Waffen SS, qui participèrent aux derniers combats de Berlin, en mai 1945. L'activité de la Résistance s'intensifiant sur le territoire même de la France, la Milice française fut créée (janv. 1943), sous le commandement de Joseph Darnand ; en liaison avec les troupes allemandes, elle participa, en particulier dans le Vercors, à la répression des maquis, tandis que certains policiers français collaboraient avec la Gestapo et le Sicherheits-Dienst (SD). Avec le retour de Pierre Laval, la politique de collaboration d'État se radicalisa : sous la pression allemande et des milieux collaborationnistes, et lui-même convaincu de la victoire nazie, il fit entrer dans son gouvernement des partisans déclarés du national-socialisme, comme Bonnard, Brinon, Darnand, Déat. En août 1944, la plupart des chefs politiques et des journalistes de la collaboration se réfugièrent en Allemagne et formèrent à Sigmaringen une Commission gouvernementale française. Arrêtés lors de l'effondrement allemand, au printemps 1945, ils furent jugés et souvent exécutés.

Dans les autres pays

La collaboration fut un phénomène commun à la plupart des pays occupés par l'Allemagne hitlérienne. En Belgique, les Allemands reçurent le double appui d'une partie du mouvement flamingant, le Vlaamsch National Verbond (VNV) de Staf de Clerq, et du rexisme wallon de Léon Degrelle, lequel rêvait à une reconstitution de l'État bourguignon du XVe s. au sein de l'« Europe nouvelle ». La presse collaborationniste belge fut illustrée principalement par Paul Colin et par le journal Cassandre. Des unités SS flamandes et wallones combattirent sur le front de l'Est, avec Degrelle. À la fin de la guerre, celui-ci réussit à se réfugier en Espagne ; il fut condamné à mort par contumace. Aux Pays-Bas existait dès avant la guerre un mouvement ouvertement national-socialiste, le NSB de l'ingénieur Anton Mussert, qui, aux élections provinciales de 1935, avait rassemblé jusqu'à 8 % des électeurs. Après 1940, sous l'autorité du commissaire du Reich, Seyss-Inquart, les hommes du NSB furent placés aux postes clés de l'administration sous contrôle allemand. En juill. 1941, tous les anciens partis politiques furent supprimés, et, en déc. 1941, le NSB fut reconnu comme parti unique. Le 13 déc. 1942, Mussert devint « Führer » du peuple néerlandais, et le NSB fut associé à l'administration du pays. La division SS néerlandaise Westland combattit, elle aussi, sur le front de l'Est. Mussert devait être exécuté après la Libération. En Norvège, l'ancien officier et ministre de la Défense Vidkun Quisling, qui avait fondé, dans les années 1930, un rassemblement fasciste, le Nasjonal Samling, se rendit à Berlin durant l'hiver 1939/40 et aida les Allemands à préparer l'invasion de son pays. Le commissaire allemand Terboven fit du Nasjonal Samling le parti unique norvégien, et, en févr. 1942, Quisling devint président du Conseil. La division SS Norge combattit sur le front de Russie. Quisling devait être exécuté après la Libération. Les conditions particulières dans lesquelles s'était effectuée, en avr. 1940, l'occupation du Danemark amenèrent les Allemands à respecter d'abord le fonctionnement de la monarchie constitutionnelle et parlementaire dans ce pays. En nov. 1940, le parti nazi danois, dirigé par Frits Clausen, tenta vainement un coup d'État, et, même après que la Wehrmacht eut pris directement le contrôle du pays, en août 1943, il n'accéda jamais au gouvernement. Mais ses militants constituèrent les rangs de l'unité SS Nordland ou participèrent avec les Allemands à la lutte contre la Résistance. Après l'effondrement de la Yougoslavie, au printemps 1941, la Croatie (v.) fut proclamée indépendante sous la direction d'un gouvernement collaborationniste dirigé par Ante Pavelic, chef des oustachis. En Hongrie, le régime de l'amiral Horthy, allié militairement à l'Allemagne contre la Russie dès juin 1941, réussit pendant trois ans à conserver son indépendance dans les affaires intérieures. En mars 1944, Horthy fut contraint d'accepter un gouvernement collaborationniste, dirigé par Döme Sztojay, mais, après l'arrestation de Horthy et sa déportation en Allemagne (oct. 1944), c'est le chef fasciste Ferenc Szálasi, chef des Croix fléchées, qui prit le pouvoir ; il gouverna en étroite union avec les Allemands jusqu'à ce que le pays fût submergé par l'avance de l'Armée rouge, en févr. 1945.

En URSS, les Allemands, considérant que les terres de l'Est occupées étaient vouées à une pure et simple colonisation germanique, n'essayèrent pas de constituer des gouvernements collaborationnistes locaux. Ils reçurent cependant l'appui de nationalistes baltes et ukrainiens, de populations telles que les Kalmouks, les Tatars de Crimée, les Tcherkesses (tous punis ensuite de la déportation), et même de Soviétiques prisonniers de guerre, qui s'enrôlèrent dans l'« armée de libération russe » du général Vlassov.

COLLABORATION. Nom donné lors de la Seconde Guerre mondiale à la politique d'entente et de rapprochement avec l'Allemagne nazie, poursuivie entre 1940 et 1945 par le gouvernement français et divers mouvements politiques. La Collaboration s'exprima sous différentes formes. Elle fut idéologique et regroupa ceux qui par antiparlementarisme, par anticommunisme ou antisémitisme, approuvaient l'ordre nouveau dans une « Europe nouvelle » dominée par l'Allemagne nazie (Robert Brasillach, Lucien Rebatet, Marcel Déat, Jacques Doriot, en Norvège Vidkun Quisling et en Belgique Léon Degrelle). Le caractère de cette collaboration détermina ses modes d'action. De nombreux journaux, favorisés par l'occupant, se firent les porte-parole de la Collaboration. Des mouvements politiques donnèrent leur appui à l'occupant ou se créèrent en France (le Rassemblement national populaire de Marcel Déat, le Parti populaire français de Jacques Doriot ou le Mouvement social révolutionnaire d'Eugène Deloncle), en Belgique (le mouvement rexiste de Léon Degrelle) ou, en Norvège (le Rassemblement national de Vidkun Quisling). Certains partisans de la Collaboration s'engagèrent aussi dans des organisations militaires qui luttèrent aux côtés de l'Allemagne contre les armées soviétiques ou contre la Résistance (Légion des volontaires français, Waffen-SS, Milice). La Collaboration politique ou Collaboration d'État fut exercée par différents pays (Croatie, Hongrie), en particulier par la France. Si la Collaboration en France, officialisée par l'entrevue de Montoire entre Pétain et Hitler (24 octobre 1940) fut considérée par certains comme une tactique politique imposée par la défaite, elle devint un véritable engagement dès les « protocoles de Paris » signés par Darlan en mai 1941 et après le retour au pouvoir de Laval (avril 1942). Elle s'exerça à travers l'aide économique à l'effort de guerre allemand grâce à la mise à disposition de bases en Syrie, en particulier par l'institution du Service du travail obligatoire (STO) le 16 février 1943, mais aussi la collaboration policière dans le maintien de l'ordre et la chasse aux juifs et aux résistants. Après la victoire des forces alliées (1944), la plupart des responsables politiques et des journalistes de la collaboration se réfugièrent en Allemagne et tentèrent de former une Commission gouvernementale française à Sigmaringen. Après la Libération, de nombreux collaborateurs furent traduits devant la Haute Cour de justice, condamnés à mort et exécutés. En Extrême-Orient, les Japonais s'appuyèrent sur des collaborateurs locaux qu'ils constituèrent en gouvernements fantoches (empire du Mandchoukouo, gouvernement de Nankin), mais aussi sur des leaders nationalistes (Soekarno en Indonésie) hostiles à la domination coloniale de l'Europe. Voir Épuration.

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