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Chronique des Pasquier de Georges DUHAMEL

Chronique des Pasquier de Georges DUHAMEL, 1933-1941, Folio.

• Cette suite romanesque en dix volumes est consacrée à l’histoire d’une famille, comme Les Rougon-Macquart auxquels se réfère Georges Duhamel tout en récusant leur aspect systématique. Elle comporte une peinture de la société française entre 1890 et 1930, mais Duhamel, qui a le goût des destinées individuelles (cf. Salavin), s’est donné un héros privilégié, Laurent Pasquier, né en 1881, devenu professeur au Collège de France au moment où, en 1931, il entreprend cette chronique de sa famille.

• La famille Pasquier, qui est issue d’un jardinier de Nesle-la-Vallée, a commencé son ascension avec le fils de celui-ci, Raymond Pasquier. Cet autodidacte pittoresque, hâbleur et fantasque a repris ses études à quarante-cinq ans en vue du doctorat en médecine, et végète avec cinq enfants dans une médiocrité que sa femme, modèle d’épouse humble et sacrifiée, s'efforce d’adoucir. Ses enfants, sauf Ferdinand qui ne sera qu’un employé obscur, connaissent tous une destinée remarquable. Joseph, l’aîné, dont les appétits matérialistes choquent Laurent, devient un grand brasseur d’affaires ; Cécile, la Princesse, dont, au contraire, la suprême finesse le fascine, est une pianiste exceptionnelle; Suzanne fait du théâtre; quant à Laurent, idéaliste fervent, il se lance avec passion dans la recherche biologique. Ces carrières sont l’occasion de dépeindre différents milieux de la vie française : l’expérience de vie collective tentée en 1906 à Créteil par un groupe de jeunes intellectuels (Duhamel en fut), désireux de créer une sorte de moderne abbaye de Thélème (Le Désert de Bièvres) ; la faculté de médecine et les instituts de recherche (Les Maîtres, Le Combat contre les ombres) ; le monde de la musique et de la littérature (Cécile parmi nous) et celui du théâtre (Suzanne et les jeunes hommes) ; le monde des affaires (La Passion de Joseph Pasquier). Cependant, Duhamel est plus attaché à l’individu qu'à la société, de sorte que la peinture de Laurent, qui est visiblement son double, constitue la part la plus riche et la plus profonde de son roman. Il décrit avec attention et délicatesse l’itinéraire de son héros, son enfance, sa première crise morale quand, à onze ans, ayant perdu la foi et déçu par ses parents, il déclare : Je veux me sauver seul (Le Notaire du Havre, Le Jardin des bêtes sauvages) ; ses apprentissages, sa quête de l’amitié, de l’amour, de la science, ses déceptions, et son refus de suivre Cécile lorsqu'elle se tourne vers Dieu (Cécile parmi nous). Malgré les insatisfactions qu’il avoue, Laurent trouve son accomplissement dans son métier et affirme un optimisme humaniste qui est la leçon de l’auteur : J’aime la vie, même quand elle me blesse, même quand elle me désespère. Que pourrait-il m’arriver qui me fît dévier de ma route ? (Le Combat contre les ombres).

• La Chronique des Pasquier est l’œuvre d'un écrivain qui refuse de désespérer de l’homme et des forces de la raison.

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