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BUTOR Michel

BUTOR Michel Originaire de Mons-en-Barœul, il a fait à Paris des études de philosophie, dont il a été, un temps, professeur. Entre 1950 et 1960, il va écrire de nombreux romans, nouveaux romans, plutôt, puisqu’il a été l’un des papes de ce mouvement littéraire. Depuis, il se consacre à la littérature de «recherche». Un recueil, Travaux d’Approches, publié en 1972, réunit des textes poétiques, écrits au cours des 22 années précédentes. Romancier, poète et essayiste, né à Mons-en-Barœul, Nord. C’est pour beaucoup d’amateurs de « fiction » le plus célèbre, le plus lu, de toute l’équipe des fondateurs du Nouveau Roman (et, d’une façon plus générale, de tous les auteurs d’avant-garde). C’est aussi celui qui, avec La Modification, en 1957, récolta les premiers lauriers (et d’abord le prix Renaudot) ; mais, de plus, l’approbation du tout-venant des lecteurs, étonnés d’y trouver une histoire (banale, affirmait modestement l’auteur, en fait très « trouvée ») et d’accéder à un genre réputé difficile. Ils pouvaient y déceler l’indice d’un modernisme éclatant: ce vous « deuxième personne », chassant le je et le il traditionnels. Ce vous qui agresse et retient curieusement l’attention, comme si on se sentait tiré par le revers de la veste. Trouvaille, en effet ; et dans chacun de ses romans, Michel Butor a risqué une audace (ou mieux une expérience) du même ordre : Passage de Milan (1954), L’Emploi du temps (1956), Degrés (1960). L’auteur s’en est expliqué lui-même dans ses Entretiens avec Georges Charbonnier (1967). Ainsi, pour ce qui est du premier cité : Dans Passage de Milan, j’avais un immeuble parisien qui avait sept étages, je crois, et qui était pris de sept heures du soir à sept heures du matin [...] chaque heure correspondait à un chapitre... Car Butor estime que le roman est le laboratoire du récit, et un des textes de Répertoire I étudie le roman comme recherche. Peu à peu, le genre romanesque va prendre chez lui une telle liberté qu’il sera tout ensemble poème, étude, et aussi « description » ; pure et simple : le titre Mobile, par exemple (1962 salut au passage à Calder), est complété en sous-titre par la définition qui suit : Étude pour une représentation des États-Unis. Quant à Portrait de l’artiste en jeune singe (1967 ; titre en clin d’œil, cette fois, à Joyce ; et à Dylan Thomas : Portrait de l’artiste en jeune chien), il est sous-titré Capriccio. Mais Butor n’avait-il pas revendiqué dans Répertoire III (1968) le droit, pour l’écrivain, de sortir des genres à « forme fixe » et, dit-il, tout faits? Autre revendication de l’homme libre en matière d’écriture, le texte intitulé La Critique et l’invention pose que toute critique est une « invention » ; et, dans Répertoire II (1964), un autre texte, Le Roman et la poésie, affirme que ce n’est pas seulement par passages que le roman peut et doit être poétique, c’est dans sa totalité. Or Michel Butor, quant à lui, est un poète : en témoigne son recueil de poèmes Travaux d’approche (1972). Et plus encore, la série en vers Illustrations (I à IV: 1961,1969,1973,1976), ainsi nommées parce que Butor s’avise, ici, de prendre élan sur une image (qu’il ne nous montre d’ailleurs pas), on sent de place en place qu’il a admiré naguère le Mallarmé du Coup de dés (en particulier son utilisation de l’espace, et ses décrochements « en marches d’escalier »). Mais Michel Butor est aussi un essayiste. Un critique d’art ; très à son aise s’il parle d’art moderne. Et d’art classique tout aussi bien (Magnasco, Pietro Longhi...). De musique moderne (ou classique, ici encore) : textes sur La Musique, art réaliste ; sur Boulez (Répertoire II). Et que dire du très serré Dialogue avec 33 variations de Ludwig van Beethoven sur une valse de Diabelli ? (« J’ai dû refaire cent schémas avant de trouver la structure définitive qui me permette de dialoguer avec le compositeur», confie-t-il au Monde du 11 juin 1971). Il a aussi en 1962 participé à une mise en cause de la musique contemporaine et plus précisément de l’art lyrique, par un texte, un livret en somme (qui sera composé par un des plus célèbres musiciens actuels, Henri Pousseur), où il renouvelle, dans son titre même, Votre Faust, le défi lancé par Paul Valéry à Goethe. Notons le sous-titre : Fantaisie variable genre opéra ; « variable » étant le qualificatif qu’a suggéré Michel Butor pour ce texte lyrique, dont on peut intervertir l’ordre des actes ou des scènes à volonté, ce qui est une extension à la scène du principe inauguré au concert par certains compositeurs d’avant-garde sous le nom de « musique aléatoire ». En résumé, Michel Butor n’a pas cessé de nous étonner par son esprit de recherche.