BUREAUCRATIE
Domination exercée par le personnel des bureaux. Le terme « bureaucratie » (apparu au xviiie siècle et construit sur le même modèle que ceux d’« aristocratie » ou de « démocratie ») a deux significations opposées. Une bureaucratie peut être un groupe qui fait fonctionner à son profit une institution (hôpital, école) sans se préoccuper, d’abord, des finalités propres de celle-ci (soigner, éduquer). Karl Marx (1818-1883) dénonçait ainsi dans l’État bonapartiste (celui de Napoléon III) un État bureaucratique, parasite vivant aux dépens de la société civile. Dès les premières années du système soviétique, un danger de bureaucratisation du Parti communiste, et donc de l’État, est dénoncé, par Lénine notamment. Il sera un argument essentiel dans la vision qu’aura Léon Trotski de l’URSS de Staline, dénoncée comme un « État ouvrier dégénéré » où la bureaucratie est une sorte de caste. Tout un courant pessimiste estime, par ailleurs, que les démocraties sont rongées par des bureaucraties qui en contredisent le principe. En France, la critique de la bureaucratie dans les entreprises et l’État est souvent reliée au jacobinisme et au style militaire de la chaîne de commandement.
Mais la bureaucratie peut aussi apparaître comme un système reposant sur un ensemble de professionnels de l’organisation qui appliquent des règles et sont des agents de la rationalisation qui caractériserait le monde moderne. C’est l’approche de Max Weber (1864-1920) pour qui la bureaucratie, groupe fonctionnel dans les entreprises, les syndicats, les Églises, permet de gagner en efficacité et d’éviter de nombreux maux : par exemple le fonctionnaire est payé par l’État et ne rend pas ses services (remplir le registre d’état civil, délivrer un diplôme, établir une fiche de paie) aux plus offrants ou d’abord à ses proches.
L'apparition de la bureautique (bureau + informatique), dans les années 1970, a profondément modifié les techniques de travail. Elle peut ainsi faire disparaître à terme des tâches peu qualifiantes (dactylographie) ou les multiplier (saisie de bases de données européennes en Asie contre de bas salaires). Et remplacer la bureaucratie par le pouvoir d’entreprises d’informatique et de télécommunication, préoccupées d’abord de leur profit.
Mot formé à partir du français bureau et du suffixe -cratie (du grec kratos, « puissance », « souveraineté »).
Forme d’organisation (d’une administration, d’un parti, d’une entreprise) dans laquelle le souci de tout prévoir et de tout contrôler anéantit la responsabilité individuelle et entraîne une forte résistance au changement.
bureaucratie, influence excessive de l'Administration sur la conduite des affaires. — La bureaucratie pose un problème dans certains Etats dits « socialistes » et dans presque tous les nouveaux Etats, où se crée, en face de la masse pauvre des travailleurs, une aristocratie des bureaux, dont les rémunérations n'ont pas de commune mesure avec celles de la population laborieuse. La bureaucratie constitue également l'aristocratie des pays sous-développés de régime autoritaire, comme l'Espagne ou le Portugal. Le but de la réforme administrative française est précisément de réformer une administration, parfois sclérosée, qui reste tournée vers le passé et constitue, de ce fait, un poids pour la nation au lieu de participer à l'effort dynamique de l'expansion; car seul peut rester jeune un pays où le gouvernement des hommes ne se réduit pas à l'administration des choses (bureaucratie).
BUREAUCRATIE
Au-delà de sa valeur purement descriptive (importance de la hiérarchie de fonctionnaires et employés de bureau dans un système de décisions économiques et politiques), ce terme est souvent pris dans un sens péjoratif, pour désigner l’accaparement du pouvoir par une organisation où les personnes sont fondues dans un anonymat qui supprime toute responsabilité individuelle et oppose à la moindre modification une lourde inertie.
La bureaucratie serait ainsi une des variantes du « monstre froid » que devait être l’État selon Hegel - particulièrement pesante dans les régimes issus de la révolution soviétique de 1917. Dès 1920, Lénine s’inquiétait de la « déformation bureaucratique » sensible dans l’État soviétique, et réintroduisant le « préjugé nuisible » selon lequel la gestion de l’État est affaire de spécialistes (ou de privilégiés). Certains analystes des « démocraties populaires », accentuant la critique que mena inlassablement Trotski de 1923 à sa mort, n’hésitent pas aujourd’hui à voir dans la bureaucratie l’équivalent d’une véritable classe sociale retrouvant progressivement la position dominante de l’ancienne bourgeoisie.
BUREAUCRATIE (n. f.) 1. — (Tradit.) Exercice de l’autorité publique par le biais d’une hiérarchie complexe de fonctionnaires. 2. — Forme de rationalisation des fonctions administratives caractérisée par l’impersonnalité, la spécialisation, la hiérarchie et la concentration, la continuité et l’importance de l’écrit. 3. — (péjoratif) Toute forme d’organisation où la lenteur, la routine, la paperasserie et la multiplicité des procédures semblent écraser l’individu.