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Bloch Ernst

Bloch

(Ernst, 1885-1977.) Philosophe allemand, aux orientations proches de celles de l’École de Francfort. Exilé aux Etats-Unis en raison du nazisme, il s'installe à Leipzig après la Seconde Guerre mondiale. ♦ Très tôt attiré par les théories socialistes et influencé par le marxisme, il a le souci de maintenir dans ce dernier une dimension proprement utopique. Pour lui, l'utopie est à entendre de façon positive, comme le mouvement même qui porte individu et société à inventer sans cesse un futur nouveau et surprenant. Cette orientation radicale de la pensée vers l'avenir doit être admise jusque dans l'inconscient, et Bloch reproche à Freud de n'avoir conçu ce dernier que comme résultant du passé, alors qu'à ses yeux « le non-encore-conscient est exclusivement le lieu de naissance psychique du nouveau ». Cette dimension « prophétique », soucieuse de réhabiliter la catégorie de la possibilité comme susceptible d'esquisser des versions du futur, s'attache aussi bien aux productions de l'inconscient (rêve, imagination, etc.) qu'aux formes les plus authentiques de l’invention musicale ou artistique (en particulier au surréalisme), auxquelles Bloch se montre particulièrement attentif.

Œuvres principales : L’Esprit de l’utopie (1918) ; Thomas Münzer (1922) ; Le Principe espérance (1954) ; Héritage de ce temps (1933) ; Sujet-objet (1958) ; Eclaircissements sur Hegel.

BLOCH Ernest. Musicien nord-américain d’origine suisse. Né à Genève, le 24 juillet 1880, mort à Portland (États-Unis) le 15 juillet 1959. Il appartenait à une famille de commerçants, mais il montra, dès l’enfance, d’évidentes dispositions artistiques. Il étudia le violon sous la direction de Louis Rey, et l’harmonie et le contrepoint sous celle de Jacques Dalcroze. En 1896, il fut envoyé à Bruxelles pour poursuivre ses études instrumentales avec Eugène Ysaye puis, par la suite, dans divers conservatoires allemands et au Conservatoire de Paris pour la composition. Durant quelques années, pourtant, il ne pratiqua la musique qu’en marge d’une activité commerciale, mais les représentations de son opéra Macbeth (d’après Shakespeare) à l'Opéra-Comique de Paris, en 1910, attirèrent sur son talent l’attention de la critique. De 1911 à 1931 il occupa divers postes d’enseignement au conservatoire de Genève puis aux États-Unis. Par la suite un mécène lui assura une pension lui permettant de se livrer entièrement à la composition. Son œuvre tend à exprimer les profonds sentiments religieux de l’âme juive. Il a écrit de la musique symphonique : Schelomo, rhapsodie pour violoncelle et orchestre, la symphonie Israël (1916), des concertos, de la musique de chambre : quatuors, quintettes, suite Baal Schem (1923) pour alto et piano, de la musique de piano, un important Service sacré hébraïque (1930), des mélodies.

BLOCH Ernst. Philosophe et historien allemand de la philosophie. Né le 8 juillet 1885 à Ludwigsnafen, mort le 4 août 1977 à Tübingen. Il fait partie, avec Lukàcs, Adorno, Benjamin, Marcuse, de ces penseurs qui reconnaissent leur dette envers K. Marx mais qui prétendent en même temps, chacun dans une perspective originale, délivrer le marxisme de tout caractère dogmatique et totalitaire et restaurer son pouvoir subversif. La bibliographie de E. Bloch est exemplaire de cette situation « en marge ». Auteur de plusieurs ouvrages d’importance, L’Esprit de l’utopie (1918), Thomas Münzer, Théologien de la Révolution (1924), Traces [1930], il se rallie après la guerre au régime de la République Démocratique Allemande, enseigne à Leipzig, où il publie son célèbre livre Le Principe espérance (1954). Mais de graves dissensions se font bientôt jour avec les autorités culturelles de la R.D.A. et E. Bloch se voit accusé, à propos notamment de son essai Différenciations dans le concept de progrès [1957], de corrompre la jeunesse. Eclate alors « l’affaire Bloch », qui se termine par l’expulsion du philosophe. A partir de 1961, il est professeur à l’université de Tübingen et continue de publier des ouvrages qui soulèvent controverses et polémiques tant à l’Est qu’à l’Ouest : L’Ontologie de l’Etre-à-venir [1961], Sur Karl Marx [1968]. S’il se réfère à la pensée de K. Marx, E. Bloch prend soin de privilégier « les textes de jeunesse », époque du prophétisme révolutionnaire, où le socialisme représente l’utopie par excellence. E. Bloch soutient que le but ultime du marxisme authentique est l’abolition de toute forme d’aliénation, et non pas de s’ériger en conception totalitaire du monde. La révolution ne se fait pas seulement en vertu des lois « sacrées » du matérialisme dialectique : il lui faut l’âme du « principe espérance ». E. Bloch est convaincu du messianisme de la pensée marxiste : elle est pour lui, sous sa forme la plus pure, explication de la différence entre ce qui est et ce qui n’est pas encore. B. Bloch, en matière de philosophie politique, tire toutes les conséquences de ces prémisses. Son analyse historique du nazisme, par exemple, révèle de manière exemplaire l’originalité de sa pensée : si la « réussite » de l’hitlérisme repose essentiellement sur « l’ignorance » des masses des mécanismes économiques, il convient, selon Bloch, de ne pas méconnaître la responsabilité du « marxisme vulgaire et libre-penseur » qui se fait le champion de la raison et abandonne aux forces réactionnaires le domaine de l’émotion, du mythe. Le vieux rêve de « l’âge d’or », débarrassé de ses scories romantiques, pourrait devenir une force révolutionnaire irrésistible. Telle est l’utopie d’Ernst Bloch.

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