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BENDA Julien

BENDA Julien
1867-1956
Essayiste, né à Paris. Cet homme qui méprisait les livres de circonstance se trouve être d’actualité par son livre publié en 1933, Discours à la nation européenne (préfacé par André Lwoff, prix Nobel). Champion de la plus stricte raison et - par suite, dit-il - de la neutralité pure et sereine de l’intellectuel, en particulier dans son célèbre pamphlet, La Trahison des clercs (1927), il avait fait un premier éclat, tout aussi vif mais moins remarqué, en 1918, avec Belphégor, où le symbole du faux dieu dénoncé par la Bible entendait donner l’image tourmentée et (pis encore, selon lui) efféminée de la littérature, au lendemain de la Première Guerre mondiale : Tous les attributs littéraires qu’exalte l’esthétique contemporaine sont de ceux que les femmes possèdent au plus haut point, ouverture sur le seul sentiment, religion du concret, perception rapide (et encore) intérêt porté au plus profond de soi-même, au plus intime, au plus incommunicable. Par quoi, sans y prendre garde, ce misogyne reconnaissait à l’âme féminine tous les attributs (pour parler comme lui) de l’homme de génie. Au lendemain de la dernière guerre, en 1945, un nouveau jet de flammes et d’imprécations du prophète Benda, La France byzantine, annonçant et dénonçant la décadence de la littérature, montrait du doigt les responsables : les grands poètes et créateurs de son temps sans exception. Mais pourquoi donc cet homme volcanique invoquait-il sans cesse la raison ? 11 avait d’autre part écrit, en 1922, un maladroit mais bien émouvant récit autobiographique, débordant de tendresse et même de sentimentalité, Les Amorandes - du latin amoranda -, qui, dans son titre même, apporte la clé du personnage. Et Julien Benda n’apparaît-il pas, avec le recul, bien plus comme un personnage, pittoresque, singulier, que comme un écrivain destiné à éterniser son nom par une œuvre belle et solide ? Si l’on veut ; mais la littérature aurait tort d’oublier les esprits indépendants.


BENDA Julien. Écrivain français. Né à Paris, le 26 décembre 1867, mort à Fontenay-aux-Roses, le 7 juin 1956. Après être passé par l’École Centrale, puis par la Faculté de Lettres, il débuta dans la littérature au moment de l’affaire Dreyfus, à la Revue blanche. Il collabora ensuite aux Cahiers de la Quinzaine de Ch. Péguy et publia, en 1910, L’Ordination. Benda participe alors au mouvement de réaction antiromantique de l’époque, dénonce le bergsonisme et les ravages du sentiment dans l’intelligence moderne. Journaliste pendant la guerre — Les Sentiments de Critias —, il publie en 1919 Belphégor, critique des tendances littéraires contemporaines à préférer la religion de l’émotion et de l’action à la spéculation pure. C’est encore le thème, en 1927, de son livre le plus connu, La Trahison des Clercs, ou il accuse les intellectuels d’avoir trahi la cause de l’esprit en cédant aux attraits de l’engagement politique — ce qui ne signifie d’ailleurs pas, dans la pensée de Benda, que le clerc doive se désintéresser des affaires temporelles. Lui-même, vers 1936 et pendant la deuxième guerre, milite avec les intellectuels « antifascistes ». Il n’a pas cessé de défendre le rationalisme démocratique entre l’appel à l’élémentaire, à la « Vie », ou d’attaquer la littérature d’aujourd’hui au nom d’un classicisme un peu sec (La France byzantine) . Mais Julien Benda néglige quelque peu la contrepartie positive. Ce n’est pas un philosophe mais un polémiste, avec ses qualités : mordant, agressivité, mais aussi ses défauts : impuissance à comprendre la pensée d’autrui qui touche parfois au sectarisme. ♦ «Ce qui fait la valeur des livres de Benda, c'est précisément le contraire de ce qu’il prône ou annonce : la passion, non pas la logique, l’humeur, non pas la sérénité, la pureté et la saveur de la forme, non pas la rigueur et l’importance du fond. Il n’est pas de littérateur plus authentique que cet ennemi des littérateurs. » Gaétan Picon.