BEAU
BEAU: le mot latin bonus (qui veut dire «bon») a sous sa forme benus un diminutif benelus devenu bellus (joli) dès l'époque classique. Ce mot a fini par triompher dans le vocabulaire latin pour exprimer non seulement ce qui est joli, mais ce qui est beau. Quant à l'évolution de la forme bellus vers le français, il faut savoir que le l devant consonne (la consonne est ici le second l) avait un point d'articulation situé vers le voile du palais (en direction du fond de la gorge). Dans ce cas, entre è ouvert et ce l vélaire s'est développé un son a, d'abord faible, puis qui a attiré l'accent : bellus réduit à bels devient bèàls. Au début du XIIe siècle, vocalisation du l en u devant s : d'où bèaus. La triphtongue eau (trois lettres prononcées d'une seule émission de voix) est passée d'une prononciation èao à une prononciation simplifiée e-o avec un e très faiblement entendu et enfin au son du simple o fermé dès la fin du XVIe siècle. Cette longue histoire ne nous explique pas encore la formation du pluriel beaux dont on trouvera le commentaire dans l'encadré sur la terminaison des pluriels en -aux.
Mais nous comprenons le jeu des deux racines bel- et beau- dans belle (féminin = bella en latin), embellir ou dans beauté, etc. On notera la forme bel de l'adjectif, venu du cas régime (accusatif) bellu(m) devant une voyelle : «un bel arbre». Beaucoup est l'addition de beau et de coup. «Recevoir beaucoup» c'est recevoir «un beau coup». La formule, venue de l'ancienne langue où on utilisait moins l'article, a été ressentie aisément comme un adverbe invariable et en un seul mot.
Note : On ne confondra pas avec l'adjectif bel le nom bel (unité de mesure acoustique ; du nom du physicien Graham Bell) ; en fait nous employons plutôt le décibel comme unité de mesure.