Aristote: « Sans famille, sans lois, sans foyer »
« L’Etat est un fait de nature, naturellement l’homme est un animal politique, et celui qui reste sauvage par organisation, et non par l’effet du hasard, est certainement ou un être dégradé ou un être supérieur à l’espèce humaine. C’est bien à lui qu’on pourrait adresser ce reproche d’Homère : « Sans famille, sans lois, sans foyer ». L’homme qui serait par nature tel que celui du poète ne respirerait alors que la guerre ; car il serait incapable de toute union, comme les oiseaux de proie. Si l’homme est infiniment plus sociable que les abeilles et tous les autres animaux qui vivent en troupe, c’est: évidemment comme je l’ai dit souvent, que la nature ne fait rien en vain. Or, elle accorde la parole à l’homme exclusivement. La voix peut bien exprimer la joie et la douleur ; aussi ne manque-t-elle pas aux autres animaux, parce que leur organisation va jusqu’à ressentir ces deux affections et à se les communiquer. Mais la parole est faite pour exprimer le bien et le mal et par suite aussi le juste et l’injuste ; et l’homme a ceci de spécial parmi tous les animaux que seul il perçoit le bien et le mal, le juste et l’injuste, et tous les sentiments de même ordre, qui en s’associant constituent précisément la famille et l'Etat. La nature pousse donc instinctivement tous les hommes à l’association politique. » ARISTOTE.
DIRECTIONS DE RECHERCHE
• Aristote dit que l’homme est « un animal politique ». Il dit d’autre part que la parole est accordée à l’homme exclusivement (Il est peut-être donné aux animaux la voix, non la parole). En quoi, comment, Aristote effectue-t-il un lien entre ces deux « spécificités » humaines ? Quelle est selon lui finalité de la parole ? • Quelle(s) différence(s) Aristote marque-t-il entre la « parole » et « la voix » ? — Détermine-t-il ce qui différencie « la voix » et « la parole » par une analyse au niveau « formel » (comme le feraient des linguistes) ou d’une autre façon ? laquelle ? — Remarquer cela n’est-ce pas important pour suivre l’argumentation d’Aristote ? • Peut-on maintenant comprendre pourquoi, selon Aristote, « l’homme est naturellement un animal politique » et que « l’Etat est un fait de nature » ? L’argumentation d’Aristote repose-t-elle sur l’idée que « la nature ne fait rien en vain » ? Si l’on ne prête pas de finalité(s) à la nature, l’argumentation d’Aristote peut-elle être encore soutenue ? Et sa thèse ?
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