anticlimax
Un anticlimax est une figure macrostructurale. Il consiste en ce que, dans le discours, se succèdent deux mouvements de gradation opposés, de manière à former entre eux une antithèse. L’anticlimax réside ainsi dans l’effet de force produit par cette articulation thématique contiguë, aucun des deux mouvements en soi ne constituant la figure. Ex. :
Surpris, comme tu peux penser, Je sentis dans mon corps tout mon sang se glacer. Je demeurai sans voix, et n’en repris l’usage Que par mille sanglots qui se firent passage. Je condamnai les Dieux, et sans plus rien ouïr, Fis vœu sur leurs autels de leur désobéir. Que n’en croyais-je alors ma tendresse alarmée! Je voulais sur-le-champ congédier l’armée. Ulysse, en apparence approuvant mes discours, De ce premier torrent laissa passer le cours.
IXI IXI IXI IXI IXI IXI Mais bientôt rappelant sa cruelle industrie, Il me représenta l’honneur et la patrie, Tout ce peuple, ces rois à mes ordres soumis, Et l’empire d’Asie à la Grèce promis : De quel front, immolant tout l’État à ma fille, Roi sans gloire, j’irais vieillir dans ma famille! Moi-même (je l’avoue avec quelque pudeur), Charmé de mon pouvoir, et plein de ma grandeur, Ces noms de roi des rois et de chef de la Grèce Chatouillaient de mon cœur l’orgueilleuse faiblesse. Pour comble de malheur, les Dieux toutes les nuits, Dès qu’un léger sommeil suspendait mes ennuis, Vengeant de leurs autels le sanglant privilège, Me venaient reprocher ma pitié sacrilège, Et présentant la foudre à mon esprit confus, Le bras déjà levé, menaçaient mes refus. Je me rendis, Areas ; et vaincu par Ulysse, De ma fille, en pleurant, j’ordonnai le supplice.
Ce discours d’Agamemnon à Areas (dans l'Iphigénie de Racine) est bâti sur un anticlimax particulièrement net. On a indiqué par les signes IXI l’articulation de la figure entre ses deux mouvements. Un premier dynamisme conduit Agamemnon à décrire sa réaction à l’ordre affreux de l’oracle qui lui commande de sacrifier sa fille : ce sont des indications, toutes de rejet à cet égard, de plus en plus vives. Suit immédiatement un second mouvement, d’orientation argumentative exactement inverse, beaucoup plus lentement exposé, qui explicite graduellement toutes les motivations qui conduisent à l’affirmation de plus en plus forte de la position opposée à la première, en présentant les raisons de manière de plus en plus dirimante, de telle sorte que le point ultime est le symétrique de l’aboutissement du premier mouvement.
=> Figure, macrostructurale; gradation, antithèse, climax.