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ANTHROPOMORPHISME

ANTHROPOMORPHISME. n. m. (du grec anthrôpos-, «être humain », et morphé «forme»). Comme l'étymologie permet de le comprendre, l'anthropomorphisme est cette tendance de notre esprit à projeter des formes humaines ou des sentiments humains sur les choses, sur la nature extérieure, sur les animaux, sur les «dieux », etc. Bref, à concevoir ce qui n'est pas humain sur le modèle humain.
· Au départ, l'anthropomorphisme désignait seulement la tendance à concevoir la divinité à l'image de l'homme, notamment dans la religion grecque. Mais il n'est pas difficile de constater que cette tendance est de toutes les religions. Elle est inhérente à la pensée magique, elle-même fondée sur l'animisme (voir ce mot).
· Mais l'anthropomorphisme est une attitude beaucoup plus large, spontanée chez les enfants, cultivée chez les poètes, fréquente dans de nombreuses réactions d'adultes. L'enfant qui prête un visage au nuage, le poète qui prête une volonté hostile à un astre, une âme à une flamme ou de l'orgueil à une machine, font naturellement de l'anthropomorphisme. Il suffit de dire qu'un paysage est mélancolique pour projeter sur les choses le sentiment même qu'elles nous inspirent. L'anthropomorphisme est d'autant plus répandu que les objets de l'industrie humaine eux-mêmes ont des formes humaines, ou sont valorisés comme tels dans la publicité (un balai, une tartine beurrée ou un flacon de parfum peuvent être personnifiés).
· En poésie, l'anthropomorphisme est une grande loi de l'imaginaire . De nombreuses métaphores, les allégories, les représentations d'une nature humanisée sont à base d'anthropomorphisme. Les dessins animés en abusent. Mais la langue elle-même en est le produit, l'homme partant de son expérience ou de sa nature propre pour désigner les choses qu'il découvre ou invente : l'âme d'un violon, le nez d'un avion, le visage de la guerre.

L'anthropomorphisme consiste à attribuer à certaines choses des qualités ou des réactions qui sont proprement humaines. Morphè veut dire « forme », en grec, ce qui implique ici qu'une représentation anthropomorphique revient à projeter inconsciemment sur le monde l'image de notre propre nature. Ainsi, par exemple, affirmer que les animaux sont doués de langage au même titre que l'homme, ou bien qu'ils disposent des mêmes sentiments que lui, relève d'une conception anthropomorphique. Il en va de même pour les croyances qui dotent la matière d'esprit ou d'émotion.
La religion est souvent traversée par cette tendance psychologique conduisant à donner une forme humaine à la divinité. Spinoza considérait à cet égard que l'anthropomorphisme est un des avatars de la superstition. Il écrivait que si nous étions des triangles, nous imaginerions un dieu triangulaire (Correspondance avec Boxel)