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Anne Hébert

Romancière et poétesse née au Québec en 1916. Cousine du poète Saint-Denys Garneau qui l’influença profondément. Enfance maladive à la campagne. Commence à écrire vers 1939. Est révélée en France en 1953 par la préface de Pierre Emmanuel à Le Tombeau des rois. Malgré les réticences de la jeune génération qui lui reproche notamment son « lâchage » du pays pour Paris où elle vit aujourd’hui, Anne Hébert est considérée au Québec comme un écrivain majeur. Elle y a reçu notamment le Prix du Gouvernement Général et le Grand Prix de la Ville de Montréal. En France, le Prix des Libraires pour Kamouraska en 1971, et le Grand Prix Littéraire de Monaco pour l’ensemble de son œuvre en 1976, lui ont apporté la consécration. Dès Le Tombeau des rois, un thème domine l’œuvre de Anne Hébert, celui de l’incommunicabilité, de l’oppression qui enserre les êtres dans sa gangue de conventions. Ce thème, l’écrivain le traduit dans « une langue réduite à l’essentiel, des poèmes comme tracés dans l’os par la pointe d’un poignard » (Pierre Emmanuel). Avec sobreté, avec pudeur même, Anne Hébert plonge au sein des passions les plus farouches. Et son passage à la forme romanesque s’opère par le truchement de la passion par excellence : l’Amour. L’Amour absolu, romanesque, sauvage. « Il n’y a que la véhémence d’un très grand amour qui puisse nourrir l’œuvre d ’art » a-t-elle pu dire. Kamouraska et Les enfants du sabbat, deux romans très proches tant par le ton que par le propos, en sont exemplaires. Dans un style dépouillé qui n’exclut pas le lyrisme — alternance de cris et de chuchotements —, Anne Hébert construit avec Kamouraska une aventure romanesque, tragique et épique à souhait, où le rouge du sang meurtrier tranche sur l’immensité des neiges immaculées. Elizabeth d’Aulnière, l’héroïne, déteste un mari que son amant tue, mari d’autant plus abhorré qu’elle fait croire qu’il est père de son enfant adultérin. Le mari disparu, elle se remarie pour donner le change à la bonne société canadienne, toute cadenassée qu’elle est dans ses préjugés religieux. Cette histoire d’amour fou qui s’achève sur une vie trahie et blessée clame la volonté de se libérer des forces de la tradition qui étouffaient naguère les mœurs québécoises. Cette emprise de l’Eglise catholique, d’un destin historique coupé de ses racines, et comme endormi, on le retrouve dans Les enfants du sabbat où Sœur Julie de la Trinité, isolée du monde dans son couvent alors que la guerre fait rage en 1944, rompt avec le silence étroit de sa soumission. Des visions se mettent à la hanter et elle se trouve littéralement possédée par le souvenir de son enfance que les autorités religieuses assimilent bien vite avec l’esprit du mal. Fantastique, poétique et romanesque, l’œuvre d’Anne Hébert est un hymne à l’imagination et à ses pouvoirs libérateurs. ► Bibliographie
Poésie Les songes en équilibre, 1942, Editions de l'Arbre ; Le Tombeau des rois, 1953, Institut littéraire du Québec ; Poèmes, Le Seuil ; Romans Les chambres de bois, 1958, Le Seuil ; Kamouraska, 1971, Le Seuil ; Les enfants du sabbat, 1975, Le Seuil , Nouvelles Le Torrent, 1965, Le Seuil ; Théâtre Le Temps sauvage, Montréal, Éditions, H.M.H.