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André CAYATTE

Après des études de droit et de lettres, André Cayatte devient avocat puis journaliste; il publie aussi plusieurs ouvrages, recueil de poèmes (Mesures pour rien, 1927) ou romans (La Peau des autres, 1936; Le Traquenard, 1939), et s’intéresse à un dossier trop vite enterré par la Justice, l’affaire Seznec. La mort brutale de ce dernier empêche Cayatte de tourner le scénario qu’il avait écrit sur ce sujet. Mais les dés sont jetés, André Cayatte fera du cinéma. Ses débuts sont ceux d’un scénariste; il collabore entre autres à l’écriture d’Entrée des artistes (Marc Allégret, 1938) avec Henri Jeanson, et de Remorques (Jean Grémillon, 1939-1941) avec Charles Spaak. Ses premiers films sont, sur la lancée, des adaptations de romans. Mais il faut attendre 1948 et Les Amants de Vérone pour voir enfin Cayatte réaliser autre chose que des œuvrettes insignifiantes. Avec Justice est faite et Nous sommes tous des assassins, il commence sa série de films à thèse, qui ne s’achèvera qu’avec son ultime réalisation L’Amour en question. Sa formation d’avocat et de journaliste allait lui permettre de donner sa mesure de cinéaste contestataire. Il tentait, en particulier, de faire prendre conscience au public des problèmes, des injustices, des drames qu’engendre une justice imparfaite. Reprenant des éléments formels proches de la tradition hollywoodienne et d’une certaine «qualité française», son cinéma posait des problèmes concrets et trouvait rapidement un écho important dans le public. André Cayatte devenait célèbre avec ses plaidoyers tour à tour ridicules (Verdict) et efficaces (Les Risques du métier), et parvenait parfois à créer le scandale (Mourir d’aimer) en défendant à chaud des causes susceptibles de déranger les spectateurs. De nombreuses demandes de censure furent, déposées pendant le tournage d’Il n’y a pas (le fumée sans feu, qui dénonçait les agissements d’un homme politique de la majorité d’alors et les complicités de la police et de la justice. Pamphlétaire, témoin de son temps, Cayatte fait des films de combat qui permettent de cerner une réalité française rarement étudiée de si près à l’écran. Il fait vivre et penser la petite et la grande bourgeoisie, présente ses tares et ses mesquineries, son pouvoir et son intolérance. La peine de mort (Nous sommes tous des assassins), le désarroi de la jeunesse {Avant le déluge, Les Chemins de Katmandou) sont aussi parmi ses thèmes de prédilection. Les mots «emphase», «manichéisme», «naïveté» reviennent fréquemment chez de nombreux critiques. Il est indéniable que les démonstrations de ce cinéaste en colère présentent une lourdeur systématique qui nuit à l’efficacité du propos. Cayatte tourne cependant des films qui, s’ils ne débouchent pas toujours sur un même niveau d’analyse et de réflexion, dénoncent un abus, une injustice, et cela sans ambiguïté. Ce n’est déjà pas si mal.

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