ALTHUSSER (vie et oeuvre)
Althusser a tenté de développer la pensée de Marx dans un sens théorique et scientifique, en la débarrassant des doctrines marxistes dogmatiques et en y intégrant les apports du structuralisme et des sciences humaines.
Philosophe français, spécialiste du marxisme, né en 1918 et mort en 1990. Atteint d'une psychose maniaco-dépressive, il fut déclaré irresponsable et interné. Il passera la fin de sa vie entre l'hôpital et son appartement. Un seul texte couvre cette période de grandes souffrances. Il s'agit d'un entretien avec Fernando Navarro, publié en 1988.
VIE
Héritier de la tradition philosophique universitaire, Althusser a tenté de renouveler le marxisme en le soumettant à une critique rigoureuse et créatrice. Le drame final de la folie jette une lumière sombre sur son oeuvre.
Du christianisme au communisme (1918-1948)
- Louis Althusser naît en Algérie.
- 1937: fonde à Marseille une section de la Jeunesse étudiante chrétienne.
- 1939: admis à l'École normale supérieure; études interrompues par la guerre.
40-1945: prisonnier en Allemagne.
1945-1948: poursuit ses études à l'ENS. Agrégation de philosophie. Adhère au Parti communiste français.
L'ENS et le drame de la folie (1948 - 1990)
- Althusser est «caïman» (répétiteur) à l'ENS; il y enseignera toute sa vie. - Dès 1965, ses oeuvres acquièrent une grande notoriété auprès des intellectuels communistes. Il apparaît alors comme la conscience critique du PCF.
- Souffrant de troubles psychiques, il étrangle sa femme au cours d'une crise de démence en 1980.
- Déclaré irresponsable, interné puis libéré. Il passe le reste de sa vie entre folie et périodes de rémission, jusqu'à sa mort par suicide en 1990.
OEUVRES
L'oeuvre d'Althusser se fonde sur une lecture critique de Marx. En revenant aux textes de Marx, elle s'efforce de se distancier des dogmes sclérosés et de la pratique politique du marxisme contemporain pour refonder une nouvelle philosophie «scientifique».
Pour Marx (1965)
Althusser distingue dans l'oeuvre de Marx une période de jeunesse, humaniste et idéaliste, dans laquelle les hommes sont encore conçus comme sujets libres et autonomes, et une période de maturité, scientifique et anti-humaniste, où la lutte des classes devient le moteur de l'histoire et où s'impose une conception matérialiste de l'homme. Pour Althusser, c'est de ce deuxième Marx que doit s'inspirer toute philosophie ayant la prétention d'être scientifique.
Lire le Capital (1965)
Cet ouvrage collectif offre une relecture de l'oeuvre majeure de Marx, inspirée de la psychanalyse et du structuralisme. Rejetant le dogmatisme marxiste, Althusser tente d'élaborer une nouvelle philosophie marxiste — selon lui insuffisamment développée par Marx, qui a privilégié l'analyse économique. Il élabore une conception de l'histoire à la fois marxiste et structurale, «sans sujet», déterminée par les conflits entre les «structures» de la société (institutions, idéologies, etc.).
Lénine et la philosophie (1969)
Althusser veut montrer que le marxisme-léninisme n'est pas simplement une nouvelle philosophie, mais une nouvelle manière de philosopher, conçue comme indissociable de l'action politique.
Philosophie et philosophie spontanée des savants (1974)
Althusser distingue entre science et idéologie et démontre que l'activité scientifique «objective» est toujours doublée par un discours idéologique, qu'il s'agit pour la philosophie de critiquer.
Éléments d'autocritique (1974)
Althusser critique ici ce qu'il appelle la «tendance théoriciste» de ses premières oeuvres et subordonne la théorie à la politique. Il définit ainsi la philosophie comme «lutte des classes dans la théorie» ou comme «intervention de la politique dans la science».
EPOQUE
La crise du marxisme
Dès les années 50, les partis communistes se démarquent du stalinisme (État totalitaire, bureaucratisme, culte de la personnalité, etc.). L'URSS s'intègre dans le jeu des relations internationales. Les partis occidentaux deviennent des partis institutionnels «révisionnistes» qui participent à la vie politique et privilégient les alliances et les réformes pour lutter contre «le capital».
Maoïsme et gauchisme
Le communisme institutionnalisé ou dogmatique est critiqué par différentes tendances. Le maoïsme rejette le modèle soviétique et prône un communisme plus démocratique, pas seulement prolétarien mais aussi paysan et populaire. En Europe, les mouvements gauchistes, s'inspirant des mouvements anti-impérialistes du tiers-monde, refusent la normalisation du communisme et prônent la révolution par la force.
APPORTS
Althusser a tenté de revivifier le marxisme théorique en y intégrant les apports de la psychanalyse, de l'ethnologie, de la linguistique et du structuralisme, et en redéfinissant les rapports entre philosophie et politique.
Une critique marxiste de Marx. Louis Althusser a soumis les oeuvres de Marx à une critique «marxiste». Il a voulu montrer que, plutôt que de déifier Marx, il fallait développer ses concepts théoriques en les appliquant à l'histoire du XXe siècle.
Réhabilitation de la philosophie. Pour Marx, la philosophie fait partie des superstructures, formations culturelles déterminées par les infrastructures économiques. Althusser veut montrer que les formations idéologiques jouent aussi un rôle important dans le fonctionnement de la société.
Théorie et pratique. Dans ses dernières oeuvres, Althusser affirme la primauté de l'action politique sur la philosophie. C'est pourquoi, bien qu'il n'ait cessé de critiquer l'action du Parti communiste français au nom d'exigences théoriques, il ne l'a jamais quitté.
Postérité-actualité.
Dans les années 60 et 70, nombre d'intellectuels de gauche se sont reconnus dans les analyses d'Althusser et dans sa critique du conformisme du Parti communiste. Toutefois, la difficulté de son oeuvre et la désuétude du marxisme l'ont fait tomber quelque peu dans l'oubli.
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