Albert Memmi

Né à Tunis en 1920, Albert Memmi, d’origine juive, est, durant la guerre, enfermé dans un camp de travail d’Afrique du nord. De 1945 à 1949, il prépare l’agrégation de philosophie à Paris. Après avoir enseigné à Tunis, il s’installe à Paris en 1956. Il est professeur à l'Ecole Pratique des Hautes Etudes.

Dans La Terre intérieure Albert Memmi, juif tunisien, professeur et écrivain français dit comment pour lui, homme de l’exil et de la déchirure, l’écriture est son lieu. Depuis trente ans, essayiste et romancier, il invente et habite cette terre intérieure, terre d’images et de mots. C’est par elle qu’il s’affirme; c’est à elle que son œuvre doit sa beauté, et aussi son pouvoir de mettre en question un monde fondé sur la dialectique de l’oppression et de la révolte. Dès 1953, le beau récit de La Statue de sel l’attestait : Memmi parle d’expérience. Et précisément ce récit où il évoque son enfance de petit judéo-berbère dans une ville cosmopolite, sa découverte de la culture occidentale, humaniste au lycée français de Tunis, son humiliation durant la guerre d’être soudain rejeté de cette culture parce que juif, éclaire toute son œuvre. Par son origine, son éducation, Memmi se situe au point de conjonction de trois cultures : la juive, l’arabe, la française. Mais ce qui l’enrichit est aussi ce qui le dilacère. Il est né colonisé, il s’illustra dans la langue du colonisateur — et cela fût-ce en répétant inlassablement sa différence — et le conflit arabo-israëlien nécessairement le touche au vif. Portrait du colonisé qui ne va pas sans celui du colonisateur montre bien comment colonisé et colonisateur sont pris au piège de la domination au point que le premier risque soit d’accepter le second soit, s’il se libère, de se transformer à sa ressemblance. Memmi donc dénonce ce piège comme dans Portrait d’un Juif et La Libération du Juif il voit dans Israël le moyen pour le juif d’échapper ensemble à une oppression séculaire et au poids de sa religion. C’est donc un double combat, pour le respect des identités et pour celui de l’universel, que mène Memmi depuis sa terre intérieure. ► Bibliographie

Récits :

La Statue de sel, préface d'Albert Camus, 1953, Corréa, 1966, Gallimard. Agar, 1955, Corréa. Le scorpion ou la confession imaginaire, 1969, Gallimard.

Roman :

Le désert, 1977, Gallimard;

Essais :

Portrait du colonisé, précédé de Portrait du colonisateur, préface de J.P. Sartre, 1958, Corréa, 1966, Pauvert, 1973, Payot. Portrait d'un Juif, 1962, Gallimard. La Libération du Juif, 1966, Gallimard, petite bibliothèque 1972, Payot. L'homme dominé, 1968, Gallimard, 1973, Payot. Juifs et arabes, 1974, Gallimard. La Terre intérieure, 1976, Gallimard.