ALAIN : TOUTE CONSCIENCE EST IMPLICITEMENT MORALE
Le langage commun ne distingue pas entre la “conscience psychologique” et la “conscience morale”. Il faut lui donner raison, nous dit Alain, car « la conscience est toujours implicitement morale ». En effet, la conscience « suppose réflexion et division », opposition entre soi et soi, soi et le monde : elle enveloppe toujours un refus et un jugement, et par là elle est toujours « doute » et « scrupule ».
« Les animaux, autant que l’on peut deviner, n’ont point de passions. Un animal mord ou s'enfuit selon l’occasion ; je ne dirai pas qu'il connaît la colère ou la peur, car rien ne laisse soupçonner qu'il veuille résister à l’une ou à l'autre, ni qu’il se sente vaincu par l'une ou par l'autre. Or c'est aussi pour la même raison que je suppose qu'il n'ont point de conscience. Remarquez que ce qui se fait par l'homme sans hésitation, sans doute de soi, sans blâme de soi, est aussi sans conscience. Conscience suppose arrêt, scrupule, division ou conflit entre soi et soi. Il arrive que, dans les terreurs paniques, l’homme est emporté comme une chose. Sans hésitation, sans délibération, sans égard d'aucune sorte. Il ne sait plus alors ce qu'il fait. Mais observez les actions habituelles tant qu'elles ne rencontrent point d'obstacles, nous ne savons pas non plus ce que nous faisons. Le réveil vient toujours avec le doute ; il ne s'en sépare point. De même celui qui suit la passion n'a point de passion. La colère, le désir, la peur, ne sont plus alors que des mouvements. » Alain (Grenoble, B, 85)
ordre des idées
1) Une thèse : les animaux n'ont pas de passions, car ils ne s'opposent jamais à elles (ils ne les subissent donc pas : ce ne sont donc pas pour eux des passions). 2) Généralisation de cette thèse : les animaux n'ont pas de conscience. 3) Explication : la conscience implique une opposition du sujet à ce dont il a conscience (elle suppose « arrêt, scrupule, division ou conflit entre soi et soi »). C'est pourquoi : a) Nous ne sommes pas conscients quand nous ne résistons absolument pas à ce que nous faisons, par exemple : — quand nous sommes « emportés » par de violentes émotions, comme la terreur panique ; — quand nous agissons machinalement, dans les automatismes. b) Nous prenons au contraire conscience de ce que nous faisons dès que quelque chose (un obstacle) venant entraver ces émotions et ces automatismes, nous les arrêtons ou les contrôlons.
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