Alain et l'apprentissage
« Il est bien sûr que les faits de nature intéressent tout homme; encore mieux, l’homme s’approche des mécaniques armé d’une merveilleuse attention. Les enfants sont de même; et je comprends qu’on veuille leur voir toujours en main un objet qu’ils défont et refont, qu’ils essaient, qu’ils explorent, qu’ils comprennent enfin comme on comprend le mécanisme d’une horloge. Seulement je suis assuré que si l’on espère éveiller l'esprit par ces moyens-là, on se trompe. Ce qui intéresse n’instruit jamais. L’homme est naturellement ingénieux, observateur, inventeur. Vous n’apprendrez rien à un chasseur qu’il ne sache mieux que vous. Et ce n’est pas d’hier qu’on nous invite à admirer le sauvage suivant une piste. Est-ce savoir? N’y a-t-il pas autre chose à savoir? Platon voulait écrire au fronton de son école : « Nul n’entre ici s’il n’est géomètre. » Par exemple, dans une horloge, c’est le mouvement régulier du pendule qu’il faut comprendre; on ne le peut sans la loi de la chute; on ne peut comprendre la loi de chute si l’on n’est géomètre. »
ALAIN
DIRECTIONS DE RECHERCHE
• Alain est-il contre, sans condition, la pratique de donner la possibilité aux enfants d’avoir « en main un objet qu’ils défont et refont, qu’ils essaient, qu’ils explorent »? • Contre quoi, précisément, s’élève-t-il? • Qu’est-ce que comprendre selon Alain? — Qu’est-ce que comprendre, pour lui, le mécanisme d’une horloge? • En quel sens faut-il comprendre instruire dans « ce qui intéresse n’instruit jamais »? — Etes-vous d’accord avec cette assertion? — Que faut-il admettre (et qui né va peut-être pas de soi) pour admettre cette assertion? • Sur quels présupposés repose la réflexion menée ici par Alain ? • On pourrait croire que ce texte est un texte de technique pédagogique. • En quoi n’est-ce pas le cas? . • En quoi ce texte présente-t-il un intérêt philosophique?