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MÉNAGE Gilles

MÉNAGE Gilles. Grammairien et érudit français. Né à Angers, le 15 août 1613, mort à Paris en juillet 1692. D’abord inscrit au barreau, Ménage l’abandonna pour la littérature et embrassa l’état ecclésiastique afin d’obtenir des bénéfices. Reçu dans le cercle des frères Du Puy, une des assemblées savantes les plus en vogue du temps, il fréquenta l’hôtel de Rambouillet et l'hôtel de Lesdiguières. Ami de Guez de Balzac, de Benserade, de Pélisson, des Scudéry et de Chapelain, il fut très lié avec Mme de La Fayette et Mme de Sévigné, pour qui il fut à la fois un soupirant et un maître. Accueilli partout, protégé par Mazarin et par Christine de Suède, il exerça longtemps une espèce d’empire sur la république des lettres, empire qui ne céda qu’aux assauts de la génération des grands classiques et particulièrement de Boileau et de Molière — dans Les Femmes savantes, il est malicieusement dépeint sous le nom de Vadius, qui s’appelait d’abord Magius. Ménage a beaucoup écrit. Si ses poésies légères — madrigaux, sonnets et impromptus — n’ont pas survécu à la mode qui les fit admirer, certaines de ses œuvres en prose sont loin de manquer d’intérêt encore aujourd’hui. Avant 1640, Ménage avait écrit la Requeste des Dictionnaires à l'Académie qui ne fut publié qu’en 1649 sans nom d’auteur et sous le titre Le Parnasse alarmé. Il y donnait ce conseil aux Académiciens : « Laissez votre Vocabulaire, / Abandonnez votre Grammaire, / N’innovez ni ne faites rien / En la langue et vous ferez bien. » Ces impertinences lui fermèrent définitivement les portes de l’Académie Française et Ménage dut se contenter d’être membre de celle de la Crusca — il connaissait d’ailleurs fort bien l’italien. Mais ce qui survit, dans une certaine mesure de son œuvre, ce sont les ouvrages qu’il a consacrés à la langue : les Origines de la langue française, parues en 1650 mais dont l’édition complète ne vit le jour qu’après sa mort, en 1694, sous le titre de Dictionnaire étymologique. On a beaucoup ridiculisé certaines des étymologies fantaisistes dont, effectivement, ces pages abondent, c’est oublier que Ménage ne pouvait mettre en jeu des moyens scientifiques qui ne furent acquis que beaucoup plus tard; étant donné les connaissances de son temps, cette œuvre est tout simplement remarquable, la meilleure preuve en est que nombre de conclusions de Ménage sont encore acceptées de nos jours. En 1672, Ménage publie les Observations sur la langue française, œuvre dédiée au chevalier de Méré et qui est une réponse aux Remarques sur la langue française de Vaugelas, mort depuis vingt ans. Ménage relève quelques erreurs de son prédécesseur, il le complète sur d’autres points, mais il est d’accord avec lui sur les principes, encore qu’il admette le néologisme dont il réserve l’usage aux poètes, aux grammairiens et aux hommes de science. Les Observations furent rééditées en 1675-1676 et connurent un vif succès dans les salons et dans la haute société. Contre l’érudit bibliothécaire du président de Lamoignon, Ménage publia un Anti-Baillet en 1690. En italien, il a donné les Origines de la langue italienne (1669); en latin, Mulierum philosophorum historia (1690). Deux recueils de Poésies latines, françaises et italiennes virent le jour en 1656 et 1687. Il faut mentionner également deux éditions remarquables, l’une des Vies, doctrines et sentences des philosophes illustres de Diogène Laërce, avec texte grec, texte latin et un ample commentaire, et l’autre des Poésies de Malherbe (1666) qui connut de nombreuses rééditions. Ménage, à sa mort, laissait en manuscrit trois volumes : Origines des façons de parler provinciales françaises, Observations sur Rabelais, et un Traité sur l’orthographe. Homme vindicatif et qui profita parfois outrageusement de l’influence qu’il exerçait, Ménage a été un savant de grande valeur et malgré Boileau et profondément il vécut auprès Molière, il convient de ne pas sous-estimer le rôle qu’il joua dans la fixation et la correction de la langue française.