Spinoza: «il serait bien avisé aux hommes de s’accorder seulement en paroles et d’être en réalité contraire les uns aux autres»
« Si un homme libre agissait, en tant que libre, en trompeur, il le ferait par le commandement de la raison (nous ne l’appelons libre qu’à cette condition); tromper serait donc une vertu et conséquemment il serait bien avisé à chacun de tromper pour conserver son être; c’est-à-dire, il serait bien avisé aux hommes de s’accorder seulement en paroles et d’être en réalité contraires les uns aux autres, ce qui est absurde. Donc un homme libre n’agit jamais en trompeur, mais toujours de bonne foi.
Demande-t-on si, en cas qu’un homme pût se délivrer par la mauvaise foi d’un péril de mort imminent, la règle de la conservation de l’être propre ne commanderait pas nettement la mauvaise foi ? Je réponds de même : si la raison commande cela, elle le commande donc à tous les hommes, et ainsi la raison commande d’une manière générale à tous les hommes de ne conclure entre eux pour l’union de leurs forces et l’établissement des droits communs que des accords trompeurs, c’est-à-dire commande de n’avoir pas en réalité de droits communs, mais cela est absurde. » SPINOZA
QUESTIONNAIRE INDICATIF
• Quelle est la condition nécessaire requise ici par Spinoza pour appeler libre quelqu’un ?
• Pourquoi «il serait bien avisé aux hommes de s’accorder seulement en paroles et d’être en réalité contraire les uns aux autres» peut-il être qualifié d’absurde?
• Pourquoi « la raison commande ... de ne conclure ... que des accords trompeurs, c’est-à-dire commande de n’avoir pas en réalité de droits communs » peut-il être qualifié d’absurde?
• Selon quel type de raisonnement « fonctionne » l’argumentation de Spinoza?
• Y a-t-il des présupposés nécessaires pour que son argumentation soit indubitable ?
• Qu’est-ce que tente d’établir Spinoza dans le premier paragraphe?
• En quoi le deuxième paragraphe est-il solidaire du premier, vient-il nécessairement après le premier?
• Qu’est-ce qui est en jeu dans ce texte?
• En quoi présente-t-il un intérêt philosophique?
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